Promouvoir sa bibliothèque

23.02.2015 | Par Gaël Sala | Relations publiques | Exemples pratiques

Ou comment commencer par enlever la poussière…

Par Gaël Sala
Après une scolarité effectuée à Bulle, Gaël Sala a commencé l’apprentissage d’AID à la BCU de Fribourg. Il a poursuivi sa formation par une année de maturité professionnelle artisanale, ceci dans le but de pouvoir entrer à la HEG de Genève. Après 3 ans d’études à la HEG, il a été engagé à la Cinémathèque suisse, où il a travaillé durant 5 ans. Depuis 2010, il est responsable de la Bibliothèque publique et scolaire de Blonay – St-Légier.
La Bibliothèque scolaire de Blonay – St-Légier est aussi bibliothèque publique depuis l’été 2010. Elle dessert la population des deux localités de Blonay et de St-Légier, qui comptent, au total, environ 11'000 habitants. J’ai été engagé pour « créer » cette nouvelle bibliothèque, ou plutôt, pour lancer cette nouvelle mission publique.
 

Créer une bibliothèque est une opportunité fabuleuse et un défi incroyable. On s’imagine alors les difficultés auxquelles on pourra être confronté : constituer un fonds adéquat, le traiter  rapidement, etc. Toutefois, si ces aspects étaient bien présents, d’autres obstacles, plus inattendus, ont fait leur apparition. Ayant un parcours de formation et un début de carrière dans des institutions plutôt tournées vers l’académique, je connaissais relativement peu le monde et les enjeux des bibliothèques publiques. Je ne me rendais alors pas compte qu’il n’allait pas de soi qu’une bibliothèque existe, tout simplement, ni qu’elle pâtit d’une image souvent désuète.
 
Si beaucoup de bibliothécaires font de gros efforts en matière de dynamisme et rivalisent d’innovations, l’image de la bibliothèque dans « l’inconscient collectif » n’en reste pas moins vieillotte et globalement plutôt négative. « Ah bon ? Il y a une bibliothèque à Blonay ? », « Vous devriez avoir ce livre, c’est un classique, on est dans une bibliothèque ! », ces deux phrases, souvent entendues, résument bien la situation : 1. un déficit de visibilité et 2. une image de temple du savoir, si possible poussiéreux et qui sent le moisi.
 
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Fort de ce constat, la bibliothèque de Blonay – St-Légier lutte contre les clichés et son manque de visibilité. Dans ce but, plusieurs actions ont été ou vont être menées, comme par exemple la création de sets de table.
 
 
Jeux, sets et bibliothèque
 
Au départ du projet, je souhaitais proposer une campagne d’affichage. Le but était surtout de signaler l’existence de la bibliothèque, et j’avais, à ce moment-là, l’idée de créer une affiche « interactive ». Les graphistes  (Studio Rubic www.studio-rubic.ch) avaient déjà avancé dans les maquettes lorsque je me suis rendu compte que l’affiche en soi était une fausse bonne idée. En effet, sur le principe cela semblait bien, mais en réalité, la pose des affiches allait être un problème, car de moins en moins de commerçants acceptent les affiches et elles sont souvent noyées parmi beaucoup d’autres. Il faudrait, pour être plus visible, utiliser les espaces d’affichage de la SGA par exemple, mais leurs tarifs sont exorbitants, sans compter les frais supplémentaires d’impression pour un aussi grand format. L’affiche était donc à mettre au placard, mais pas question de laisser tomber ce projet pour autant.
 
C’est en mangeant au restaurant et en voyant un set de table publicitaire que je me suis dit « Pourquoi pas nous ? ». Il ne semblait pas trop compliqué de reprendre la maquette de l’affiche et de la faire pivoter de 90°. Nous pouvions, dès lors, aller même plus loin que clamer notre existence. Nous pouvions aussi passer quelques informations et même tenter de « casser » certaines idées reçues. 
 
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L’interactivité souhaitée au départ prenait tout son sens avec un set. Nous avons donc eu l’idée de créer des petits jeux pour inciter les gens à regarder de plus près le set. Ces jeux permettaient en outre de faire passer quelques messages ou informations. Les sets sont donc nés. Afin de couper court à toute polémique quant à leur coût, nous avons cherché des sponsors pour couvrir les frais d’impression des sets. L’impression représentait un montant de 1'200 CHF pour 20'000 exemplaires, 10 sponsors à 120 CHF ont été trouvés. Nous avons ensuite proposé ces sets aux restaurateurs des deux localités. Sponsors et restaurateurs ont très bien accueilli le projet.
 
Je mentirais en disant que grâce aux sets la fréquentation de la bibliothèque a augmenté, mais cela n’était pas le but principal. Il y a beaucoup de raisons pour lesquelles les gens ne viennent pas en bibliothèque et il serait (trop) facile de se contenter de créer un set de table. Nous ne voulions plus, par contre, que l’existence d’une bibliothèque à Blonay soit ignorée ou que l’image négative de la bibliothèque perdure. Le pari n’est pas encore gagné, mais d’après les retours que nous recevons, la bibliothèque jouit d’une excellente réputation et véhicule une image dynamique et accueillante. Quant à la visibilité, les sets sont bien sûr insuffisants et nous devons mener d’autres actions, et...
 
Aller à la rencontre de ses usagers
 
La bibliothèque de Blonay – St-Légier a un site web pour elle, élaboré et tenu à jour par elle seule. La chose est suffisamment rare pour être mentionnée ! La présence électronique de la bibliothèque s’étend aussi à des réseaux sociaux comme Facebook ou Tweeter. Ces canaux électroniques restent d’excellents moyens de communication. Un site bien réalisé (tant au niveau ergonomique que visuel) et des réseaux sociaux régulièrement alimentés permettent de véhiculer une image positive de la bibliothèque et de fidéliser les usagers. Toutefois, aussi dynamiques et interactifs que ces canaux puissent être, ils n’en restent pas moins des « vitrines ». Et comme pour n’importe quelle échoppe, la vitrine est utile uniquement si le chaland passe devant !
 
De nos jours, la bibliothèque doit aller à la rencontre de ses usagers. Elle ne peut plus attendre qu’ils viennent tout seuls. La bibliothèque doit sortir de ses murs. C’est dans ce sens que la bibliothèque de Blonay – St-Légier travaille désormais. Des actions simples suffisent parfois. Nous sommes par exemple présents depuis plusieurs années maintenant à l’accueil des nouveaux habitants, organisé par chacune des deux communes. Cette manifestation ne nous demande aucune préparation, ne coûte pas d’argent et permet d’attirer un grand nombre de nouveaux usagers.
 
Nous souhaitons également monter des stands extérieurs, sur des places où les gens sont, où les gens passent. Nous avions également l’idée d’engager des conteurs pour « haranguer les foules » en racontant le début d’un conte dans la rue et en le terminant à la bibliothèque.
 
 
Des idées, il y en a toujours, mais il faut des moyens pour les réaliser, direz-vous. La bibliothèque de Blonay – St-Légier ne fait pas exception. Elle n’a pas des moyens financiers et humains illimités, loin s’en faut. Nous essayons donc de trouver des idées simples, peu onéreuses et si cela s’avère nécessaire, nous essayons de trouver de l’argent ailleurs. Tout cela peut être grandement facilité par un soutien politique. Malheureusement, les politiciens font souvent partie de cette population qui garde une image rétrograde de la bibliothèque, avec en plus, l’impression qu’elle coûte cher. Le changement de mentalité devrait donc déjà s’opérer à ce niveau, via du lobbying et une bonne communication de la part des professionnels ID.
 
Gaël Sala 
 

La bibliothèque de Blonay a participé, avec le projet des sets de table, au concours international du marketing en bibliothèque de l’IFLA, où 16 pays et plus de 30 projets étaient en lice – et ceci avec succès : le projet fait partie des "top 10".
 
Vers la section Management and Marketing de l'IFLA >

 
 
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